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Strangethink
En débarquant aux États-Unis, en Finlande, en Suisse ou au Yémen, les aliens de Strangethink prendraient probablement les terriens en très haute estime : « Quelle planète formidable ! A-t-on déjà vu tant d’artistes au gluten carré (système métrique local) ? ». Il faut dire que les pinceaux aliens ressemblent à s’y méprendre à armes à feu. Espérons donc que la visite de ces cousins extra-terrestres soit de courte durée, et qu’ils n’aient pas le temps d’allumer la télévision de leur chambre d’hôtel : il en va de notre galactic cred’.
Sur Strangethink (les aliens ont nommé la planète en référence à leur démiurge) il n’est pas rare de voir un individu arpenter le musée un fusil à la main. C’est l’artiste, faisant le tour de sa propre exposition et cherchant l’inspiration dans les visages ébahis ou perplexes des visiteurs. Sur Strangethink en effet, les expositions s’élaborent sur place, dans le module central permettant à l’artiste de reproduire ses œuvres sur les murs en temps réel. La peinture n’est pas appliquée, mais projetée de façon procédurale, et sa couleur dépendra du nombre de glutens séparant l’artiste et sa toile. Un humain serait d’abord dérouté par une telle technique, mais l’art procédural s’apprend vite, et il ne mettrait sans doute pas longtemps à peindre des œuvres dignes des grands maîtres Strangethinkiens. Qu’il n’espère cependant pas passer à la postérité : sur Strangethink, l’art est éphémère, palimpseste. Les couleurs se superposent à l’infini et les toiles sont blanchies à la fin de chaque exposition.
Loin de nos ennuyeuses collections d’œuvres mortes, les expositions de Strangethink sont des moments de vie et de joie, et loin de nos outils de mort, les fusils de Strangethink sont d’inventifs moyens d’expression. En fait, peut-être vaudrait-il mieux que les habitants de Strangethinks s’attardent un peu par chez nous : ils ont beaucoup à nous apprendre.
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