A Game About Game Literacy

A Game About Game Literacy (Browser)
Damian Sommer

 

Un jeu nommé A Game About Game Literacy réalisé pour le Game Prototype Challenge #6…vous vous doutez que je me suis jeté dessus. C’est d’ailleurs presque un miracle que je n’ai pas été déçu.

 

A Game about Game Literacy est un petit metroidvania qui a son titre pour seule prétention. « Game literacy » pourrait être (mal) traduit par « l’alphabétisation du jeu », il s’agit en fait de l’apprentissage du jeu par lui-même, spécificité du jeu vidéo étudiée notamment par Jame Paul Glee dans son essai « What video games have to teach us about learning and literacy ? ».

Quand vous jouez à un (bon) jeu vidéo aujourd’hui, vous n’avez en effet que très rarement besoin de vous référer au manuel. La difficulté croissante et les tutoriaux intégrés vous permettent non seulement d’en saisir les règles, mais aussi de vous perfectionner dans leur exécution et ce sans que vous n’ayez pourtant l’impression d’apprendre. C’est ça la magie du jeu vidéo, et c’est ça aussi que Damian Sommer a voulu exprimer.

 

Est-ce qu’il y arrive ? Oui, assurément. Le joueur apprend bien au cours des différents niveaux à maîtriser les commandes et à prendre les bonnes décisions. La difficulté augmente et pourtant, à aucun moment le joueur ne se sent dépassé par le challenge (a part peut-être pour le dernier niveau, joyau de level-design), il est « formé » par le jeu. La meilleur preuve consisterait à présenter le dernier niveau du jeu à quelqu’un qui n’aurait pas expérimenté les précédents. Ce niveau lui semblerait alors strictement impossible, et il ne parviendrait même pas à envisager ce qu’il est supposé faire. Parce qu’il n’a pas appris à se laisser tomber dans le vide pour mieux sauter, il trouverait que le saut est trop court, parce qu’il n’a pas appris à prioritiser ses mouvements et à collecter les montres au bon moment, il trouverait que le temps imparti est beaucoup trop court.

 

 

L’objectif de l’auteur est donc rempli, et le jeu s’offre qui plus est le luxe d’être joli et sympathique. Mais une question demeure : qu’en aurait-il été de ce jeu s’il s’était plutôt appelé « Minitroid » ou n’importe quel nom plus ou moins abstrait dans le genre ? Il n’en aurait pas été moins bon, et il aurait pourtant sans doute suscité moins d’intérêt. Pourquoi ? Juste parce qu’au final A Game About Game Literacy ne fait rien de plus que n’importe quel autre bon jeu, ce « game literacy » qu’il met en scène existe dans chacun d’eux, et parfois même de manière plus marquée.

La singularité de A Game About Game Literacy est de faire remarquer, par son seul titre, quelque chose qui est supposé demeurer caché. On joue alors au jeu autrement, en réfléchissant aux méthodes qu’il emploie, en ayant du recul sur notre propre performance (on ne finit le jeu que parce que c’est ce que l’auteur attendait de nous). Jouer à A Game About Game Literacy, ce serait comme regarder le film Titanic titré A Movie About Making You Cry, je suis certain que celui-là, justement, ne vous ferait pas pleurer.

 

A Game About Game Literacy n’est pas un jeu qui divertit, mais un jeu qui fait réfléchir, qui pousse à l’analyse. Il est probable qu’un joueur n’ayant jamais entendu parler du concept d’ «alphabétisation du jeu » se mette alors à l’observer dans les autres jeux, et s’ils sont bien conçus, à les apprécier d’autant plus.

Si A Game About Game Literacy est si intéressant, ce n’est donc pas parce qu’il s’agit d’un bon jeu, mais parce qu’il a le pouvoir de rendre les autres jeux meilleurs.

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4 Comments

  1. Et en fait il existe déjà un Minitroid http://youtu.be/pGgApXz0X68 un fan-game low-res 😉
    Sinon, ce jeu est très malin en effet!

  2. Il a l’air super chouette en plus!

    J’espère que l’auteur ne va pas réclamer des royalties ^^.

  3. Sinon Game About Literacy m’a fait penser à Knytt Stories: graphismes minimalistes, et même mécanismes simples (pouvoirs à acquérir peu à peu), ce qui apparaît clairement dans l’éditeur de niveaux de KS, où c’est nous-même qui plaçons les upgrades de façon à rendre le niveau le plus intéressant possible.

  4. Il y a de ça. Il faut dire que Knytt Stories doit être une référence pour tout ce qui est platformer/exploration/metroid-like

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