Unmanned

Unmanned (Browser, Windows, Mac)
La Molleindustria

 

La sortie d’un jeu du studio La Molleindustria est toujours un événement. D’abord parce que cela n’arrive pas si souvent, ensuite parce que Paolo Pedercini s’efforce de toujours explorer de nouveaux procédés rhétoriques, de nouvelles façons de convaincre, d’interroger, d’émouvoir à travers le médium jeu vidéo. Bien entendu, Unmanned ne déroge pas à la règle et constitue une nouvelle réussite. Ne vous fiez pas donc à ses gros polygones et à son personnage évoquant un Duke Nukem de la première heure, il s’agit d’un jeu résolument moderne, d’un pionner qui saura je l’espère faire des émules.

Ancré dans le contexte actuel de la guerre au Moyen Orient, Unmanned se concentre avant tout sur le concept de dualité, symbolisé à l’écran par la fragmentation de la fenêtre de jeu.

 

La première dualité repose sur le gameplay lui-même : à droite, une succession de mini-jeux qui mettront l’habileté et les réflexes du joueur à l’épreuve, à gauche, un récit interactif qui parlera à son cœur et à son intelligence. D’ores et déjà, Unmanned semble opposer les actes et la pensée/dialogue, le corps et l’esprit. S’il est tout à fait possible de privilégier l’un ou l’autre des écrans, seule la capacité à jouer sur les deux tableaux permettra de décrocher la totalité des médailles et d’ainsi de profiter de tout ce que le jeu a à offrir en termes d’émotion et de réflexion.

 

 

Ces médailles elles-mêmes ont une double signification. On peut y voir des récompenses accordées aux joueurs, traditionnels achievements témoignant de la complétion du jeu, mais difficile aussi de ne pas voir dans leur design évocateur des médailles strictement militaires. Nous voilà donc face à une deuxième dualité : le jeu, la guerre. Celle-ci est omniprésente dans Unmanned, et pour cause, elle en est le sujet. Si la thématique des jeux de guerre FPS, bien éloignés de la réalité, est abordée, ce sont surtout ces drones pilotés à distance, ces bombardiers unmanned, transformant la guerre en jeu vidéo, qui sont au centre du récit. On tue désormais installé confortablement devant un écran. Pas de sang, pas de pleurs, juste des boutons à presser. « Warcraft sans le craft ». A l’opposé, avec La Molleindustria, le jeu vidéo s’engage, se politise, et devient ainsi lui-même arme de guerre d’opinion.

 

De ces dualités, le corps/l’esprit, le réel/le virtuel, s’en dégage une troisième, celle qui sous-tend Unmanned, que les auteurs souhaitent nous faire ressentir : celle de l’homme et de la machine ou, pour être plus précis, du soldat et du drone. La machine remplace l’homme tandis que l’homme devient machine, idées que l’on trouvera évoquées dans certains dialogues. C’est de cette relation que traite finalement Unmanned, une relation compliquée qui vient polluer toutes les autres. Ce sera alors à chaque joueur de faire ses propres constats, de choisir ses propres réactions et de dresser ses propres conclusions. Mais rappelons-le : quelques soient ces conclusions, elles auront été conçues, pensées, écrites pour vous au préalable. C’est la force de La Molleindustria, et c’est la force du jeu vidéo.

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7 Comments

  1. Petite faute de frappe : « Ce sera alors à chaque jouer « 

  2. Merci! corrigé!

  3. Excellent article,
    J’ai été touché par le jeu, mais cet article m’a permis d’entrevoir des aspects du jeu qui m’avait échappé.

  4. Si ça t’intéresse, deux autres points de vue en français au sujet d’Unmanned : http://merlanfrit.net/La-banalite-du-mal et http://www.gamersepicerie.com/?p=2557

  5. Et pourquoi pas aussi visiter ce site https://solitaire247.fr Peut-être que vous pourriez vous détendre en jouant à un bon jeu de sol

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