Connections (Browser)
Mindful XP
Je m’appelle John.
Je suis né d’Esther, jeune maman pleine de vie, et de Claude, père autoritaire mais, comme on dit souvent pour l’excuser, juste. Ceux là m’ont toujours donné l’amour dont j’avais besoin et, au sein de ce cocon familial, j’avais l’impression que rien ne pouvait m’atteindre. Aussi, quand une hypothétique petite sœur commença à faire parler de lui, je paniquai. Comment pourrais-je recevoir autant d’amour si celui-ci devais être partagé ? Je fis alors la chose qui me semblait le plus raisonnable (quel idiot!) : je fuguai.
Ma première expérience de la vie dehors fut terrible : j’ai découvert le danger, l’hostilité, la solitude…tout ça en moins de cinq minutes. Pourtant, quand je suis rentré de ma malencontreuse escapade, Judith était née. Elle était si petite, si fragile que j’ai immédiatement compris que mon rôle d’ainé était de la protéger. Nos parents ne partagèrent pas leur amour entre nous, non, ça ne marche pas comme ça, l’amour ne se divise pas, il se multiplie. Nous étions plus nombreux et avions donc plus d’amour à donner. Alors, Lucas est né à son tour. Tous les cinq, nous étions indestructibles.
En grandissant, j’ai commencé à traîner hors du foyer, j’ai ainsi forgé mes premières véritables amitiés. Il y avait Colette, pétillante comme un verre de champagne, et deux jumeaux : Gary et Gervais. C’est avec eux que je passais désormais tout mon temps, on nous appelait « les inséparables ». A l’époque je ne savais pas que les inséparables étaient supposés être deux.
Ces moments furent sans doute les plus heureux de ma courte existence, mais pendant ce temps mon père dépérissait, et j’étais trop insouciant pour m’en apercevoir.
L’annonce de son décès me fit l’effet d’un détonateur dont nous étions tous les bombes : si lui, cet être puissant et gorgé d’amour, pouvait mourir, alors nous le pouvions tous.
J’abandonnai mes trois amis pour retourner à ma famille. Judith avait bien grandi, je la reconnaissais à peine. Mon petit frère quant à lui avait quitté comme moi le cocon et n’entretenait guère plus de rapports qu’avec ma mère. Jamais je ne le reverrai.
Mes liens avec Judith se resserrèrent tandis que je m’éloignais de mes amis cette fois. Je ne fus même pas là pour voir Colette et Gary s’acoquiner et quitter nos contrées. Ils n’étaient d’ailleurs pas les seuls à vivre une romance : j’avais rencontré moi-même une petite Sarah qui m’aidait à passer outre le décès de mon père. Sarah ne m’aimait pas. Je lui donnais ainsi bien plus que je ne recevais, mais c’était bien comme ça, j’en avais à revendre, de l’amour.
Je papillonnais ainsi de Sarah à Judith, de Judith à Maman et finalement de Maman à Gervais, semant et récoltant ce qui pouvait bien pousser. Seulement voilà : il ne poussait plus grand chose. D’où venait donc toute cette énergie qui m’animait autrefois ?
Le temps passa ainsi, maussade.
Un jour j’appris la mort de Gary au téléphone. J’eus alors l’occasion de revoir Colette et de découvrir que nous étions maintenant de parfaits étrangers. Mon cercle venait une fois encore de se réduire, et considérablement. Je pouvais sentir mes forces m’abandonner. J’étais vide, terne, je ne pouvais plus rien faire pour ceux que j’aimais, je me sentais mourir.
Étais-je atteint de la même maladie que mon père ? Allais-je disparaître moi aussi ?
Après tout…c’était peut-être pour le mieux. Je ne supporterais pas de voir ma mère partir, de voir Judith s’éloigner, d’observer Gervais redevenir un inconnu, de voir Sarah m’oublier aussi facilement. Alors j’ai fait ce que la Nature attend d’un être devenu inutile tel que moi, je me suis éteint.
pyrofoux
Ouah. Ça fais toujours bizarre quand vous êtes mort et que votre vie défile devant vos yeux.