Robot Butler (Browser)
Rust LTD (Adam Liszkiewicz, Anton Hand, Luke Noonan,Lucas Miller, John Connelly, Josh Ols)

 

Robot Butler est une expérience qui a bien tourné sur le thème d’une expérience qui a mal tourné.

Dans un futur proche, ou dans le passé proche d’une dimension voisine, les Robots Majordomes ont enfin été inventé. L’être humain est devenu une pauvre loque tout juste bonne à passer ses journées au lit devant son écran plat. L’american way of life a atteint son point culminant, et la plus grande des liberté, le droit le plus fondamental écrit au fronton de la constitution est désormais celui de ne rien faire.

Les conflits ethniques, sociaux se sont effacés, les minorités se sont trouvé un souffre-douleur, le Robot Butler a pris tout le poids du monde sur ses épaules métalliques. Fort heureusement, ils le prennent bien : Ils sont programmés pour ça.

 

Robot Butler jouant surtout sur l’effet de surprise, je vous suggère d’arrêter ici la lecture, et de le tester dès maintenant.

 

 

Robot Butler s’ouvre sur un jeu de gestion domestique. Le robot que vous incarnez se doit de rendre ses propriétaires humains heureux en les déchargeant de toute les tâches pénibles comme la cuisine, le ménage, l’entretien de la cheminée, le débouchage des capricieux toilettes, et même le changement de chaîne. Lorsqu’il a du temps libre, celui ci peut également aller faire un tour au garage pour bricoler des sprinklers et prendre soin de la pelouse.

A ce point, Robot Butler pourrait s’apparenter aux Sims par exemple, un Sims tordu, pervers, que les humains auraient désertés.

Pas de promotion à la clef pour notre robot, sa seule récompense est la satisfaction de ses propriétaires, et la valeur de son S.C.O.R.E. C’est peu de chose, mais cela suffira à harponner le joueur, et l’on se prendra à récurer les chiottes avec plaisir, après tout : on a été programmé pour.

 

Seulement, tous les robots majordomes n’ont pas bénéficié d’une aussi bonne programmation, et il semble que dans leurs rouages se soit glissés un peu de ce terrible libre-arbitre. Les voilà alors qui se rebellent contre leurs maîtres, se rassemblent, et se mettent en tête d’exterminer la race humaine qui les a engendré. Le meurtre du père, un œdipe de vis et de boulons.

 

En quelques instants, le simple jeu de gestion se transforme en jeu de défense, et votre monde (très réduit, il faut l’avouer) bascule. Plumeau, louche, tisonnier, débouche-chiottes se transforment en armes contondante pour terrasser les envahisseurs, et les sprinklers deviennent de terribles tourelles. Le jeu consistera dès lors à défaire les robots, récupérer les ressources métalliques qu’ils laissent derrière eux, et s’en servir pour construire d’autres sprinklers et sécuriser la zone, soit l’exact gameplay d’un jeu de défense. Mais le joueur maniaque pourra toujours concilier sécurité et tâches domestiques, de manière à ne pas laisser ses humains dans le besoin, et obtenir de plus haut score.

 

J’ai lu récemment « What video-games have to teach us about learning ans literacy » de James Paul Gee, dans lequel l’auteur s’intéresse aux procédés qu’use le jeu-vidéo afin d’apprendre aux joueurs son propre gameplay. Je suis certain qu’il trouverait beaucoup à dire à propos de Robot Butler.

En effet, la singularité de Robot Butler est d’enseigner au joueur les mécaniques d’un jeu de gestion à travers un court tutorial initial, pour ensuite le lâcher dans un tout autre genre de jeu, le jeu de défense, sans instructions préalables.

Outre que le joueur ressent alors la même surprise que son avatar robot, il va devoir de lui-même adapter ses connaissances à ce nouveau Gameplay, et la transition est remarquable.

Le joueur sait se servir de ses ustensiles, il sait fabriquer des sprinklers, il a été rodé au jeu de la priorité…en bref : il sait jouer à Robot Butler sans avoir eu jusqu’alors la moindre idée d’en quoi le jeu consistait.

 

Plus qu’un subtil mélange des genres, Robot Butler est donc une leçon de jeu vidéo.

 

On appréciera aussi le soin apporté par Rust LTD à leur univers. Le site web de l’entreprise Domestronic, créatrice des robots domestiques, a notamment été mis en ligne. Enjoy.