Gamer Mom

Gamer Mom (Browser)
Mordechai Buckman et Kyler Kelly

La situation de la mère de famille désespérée parce que son enfant joue à World of Warcraft, c’est connu, cliché même. Mais la situation de la mère de famille désespérée parce que le reste de sa famille refuse de la rejoindre sur World of Warcraft, c’est tout de même plus singulier.

 

Gamer Mom se présente comme une simple petite saynète interactive avec choix de dialogues et fins multiples, et d’ailleurs, c’en est une, mais elle dispose de plusieurs atouts qui la rendent peu anodine et qui en font, vous n’allez pas me croire, un véritable petit chef-d’œuvre.

 

 

D’abord, il y a les graphismes. Pauvres en apparence (trois personnes assises autour d’une table) ils se révèlent extrêmement subtils dans la gestuels et les expressions des personnages. Ce niveau de détail, on a peu l’habitude de le rencontrer dans les jeux vidéo, l’animation hyper-réaliste des cheveux en 3D, oui, la reproduction à l’identique du mouvement des seins qui ballottent dans le soutif, aussi, mais ce langage du corps, ces tics nerveux, et cette expressivité rendue en trois coups de crayon, c’est quelque chose d’ordinaire réservé à la bande dessinée.

 

Ensuite, il y a la narration. Malgré la singularité de son scénario, les auteurs parviennent à nous donner l’impression d’avoir vécu cent fois cette scène, parce qu’elle sonne juste, tout simplement. Le personnage de la mère est particulièrement touchant, on s’attache, on s’identifie, on finit par nous aussi sincèrement vouloir les convaincre, ça semble une si bonne idée après tout…et on se prend une gifle à chaque silence, chaque sous-entendu, chaque refus. C’est dur, ça fait mal, c’est bon.

 

Mais si Gamer Mom repose sur la narration et sur des graphismes issus de la BD, qu’est-ce qui la différencie au final d’une bande dessinée interactive ? Réponse : une interactivité qui va bien au delà du choix de dialogue. D’abord, on ne choisit pas les lignes de dialogues, on choisit des comportement, des approches, des stratégies…le tout ressemblant prenant presque au final des allures de Dating Sim dans le gameplay. D’autre part, le jeu ne communique par seulement par les dialogues, les graphismes, mais par l’interface elle-même. Les boutons se dérobent, rétrécissent, se multiplie vainement, et parviennent à eux seuls à exprimer des émotions : l’espoir, la tristesse, la résignation…

 

La narration de Gamer Mom étant particulièrement touffue, le jeu gagne à être rejoué plusieurs fois, ne serait-ce que pour découvrir toutes ses petites surprises. Je ne sais pas s’il existe une manière de « gagner », puisque tous mes essais se sont révélés infructueux, mais cela a peu d’importance, Gamer Mom est un de ces jeux où l’échec devient un plaisir.

 

← Previous post

Next post →

8 Comments

  1. Il y a visiblement un moyen de les faire jouer à wow, c’est annoncé au bout d’un certain nombre de tentatives ratées !

    Mais alors, effectivement, pour intéresser une ado-téléphone et un mari-power-point, c’est chaud !

    En tout cas, comme tu dis, les crayonnés sont excellents ! Ça me rappelle la linea, va savoir pourquoi…

  2. Effectivement, une vraie perle.
    Le concepteur sait jouer sur des éléments d’apparences basiques (les boutons).

    Je l’admire.

  3. Mais… c’est le meilleur jeu de discussion jamais créé !

  4. Je suis admiratif moi aussi! Pour tout dire, c’est typiquement le genre de truc que j’aurais aimé être capable de créer.
    @Sakutei, et tu as réussi alors ? Je pense que je vais réessayer du coup!

    Et c’est vrai que le père avec sa bouche pincée rappelle le héros de la linea!

  5. Hop! Merci à Exythe sur Indiegames.com pour le walkthrough :

    Right off the bat, « I think it might be safe to ask ». No chit chat, no talking, no nothing. Then
    Go all in
    Present the vision
    Don’t slow down!
    We’ll start on Thursday
    And then get the hell out of there.

  6. Ah, donc c’est le mieux qu’on puisse faire que d’aller directement au jeudi ?
    Un peu frustrant :/

    Sinon oui, plutôt riche comme jeu, surtout par rapport à ce qu’il laisse suggérer de prime abord.

  7. Hum je suis parvenu à une fin où le mari est plus ou moins mis à contribution de manière involontaire. Avec des coeurs dans les boutons et tout. Ça ressemble à un final positif mais encore incomplet.

    Il doit y avoir d’autres combinaisons plus satisfaisantes que de se rendre au jeudi.

    Néanmoins, à force de se taper toutes les scènes angoissantes et navrantes, ça plombe !

  8. Nostrazugus

    Je crois que j’ai pu explorer les trois fins les plus « satisfaisantes »

    Faire jouer le père
    Faire resurgir une forme de romance
    Parler ouvertement des problèmes familiaux

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *