Orienteer (Browser [Unity])
Fromage de Soja

 

 

Les jeux à la première personne nous ont habitués, conditionnés même, à deux choses : la première, ce sont bien évidemment les armes, à tel point que jeu à la première personne est bien souvent réduit à l’appellation FPS, jeux de tir à la première personne. Cela fait fort heureusement plusieurs années que des studios intelligents et des développeurs indés égratignent ce concept en proposant de nouvelles idées.

La deuxième chose, moins évidente, c’est l’aide à l’orientation. Réfléchissez une seconde : à partir du moment ou un jeu à la première personne propose d’évoluer dans des environnements vastes, on y trouvera presque toujours une mini-map, avec un point qui clignote pour indiquer notre position, ou carrément des flèches qui apparaissent à l’écran pour nous indiquer la direction à suivre. C’est d’ailleurs bien normal : il ne faudrait pas que l’expérience du jeu soit gâchée parce qu’on a (comme moi) le sens de l’orientation d’une huître.

Mais si l’orientation était justement le seul but du jeu ?

 

 

À l’occasion de la TigSource Compo au thème « Sports », Fromage de Soja nous propose un sport encore inexploité dans le jeu vidéo : la course d’orientation. Lâché en pleine nature avec une carte et une boussole, il nous faudra mettre la main sur les cinq objets-témoins le plus rapidement possible. L’idée est certes bonne, mais est-ce que tout cela ne serait tout de même pas un brin ennuyeux ?

Eh bien contre toute attente : pas du tout ! L’orientation tout d’abord représente un véritable défi : Pas moyen de savoir où l’on se trouve sur la carte autrement qu’en observant notre environnement et en le confrontant aux aiguilles de notre boussole. Si on est incapable, comme moi, de s’orienter de tête, on passera la moitié de son temps les yeux rivés sur la carte en essayant de la déchiffrer. (pensez à baisser les yeux pour lire la carte/voir la boussole, j’ai mis du temps à trouver). Il sera également possible de poser et d’orienter la boussole sur la carte, pour déterminer des caps précis, même si l’environnement nous incitera bien souvent à faire des détours…

 

Sans présenter le moindre puzzle, la moindre énigme, Orienteer fait donc pourtant travailler notre cerveau à plein régime, nous propose de vrais défis, et ceci pourrait suffire à nous y retenir. Mais le jeu fait mieux encore, puisqu’il instaure également un vrai rapport au corps. Marcher dans l’eau, sur du sol glissant ou sur des rochers instables pourra nous faire trébucher et considérablement nous ralentir. Des chutes trop hautes ou trop violentes pourront également nous faire perdre des points de vie et nous conduire, si ce n’est à la mort, à un abandon de la course. Nous voilà donc contraint de lever les yeux de notre carte, de regarder où l’on met les pieds, d’avancer avec prudence, de s’arrêter parfois quelques dizaines de secondes pour reprendre notre souffle. Grâce à ce système, Orienteer sonne juste, vrai, et il ne suffira que de quelques minutes pour s’immerger complètement dans la course. On s’attendrait presque à croiser d’autres joueurs, aussi perdus que nous, en train d’essayer d’escalader une montagne ou se frayant un chemin dans les hautes herbes. Une dernière chose qui ajoute à ce réalisme, c’est la liberté de choix. La carte aurait pu être conçue pour nous embrouiller, nous contraignant à de longs détours, nous interdisant certains accès, mais ce n’est pas le cas, on aura toujours le choix : Une falaise vient se mettre au travers de votre cap ? Vous pourrez aussi bien la contourner que tenter de l’escalader. Une rivière ? Il doit bien exister un pont plus loin pour la traverser mais après tout…le courant ne doit pas être si fort..si ? Les choix stupides seront bien entendu sanctionnés, mais la liberté est bien là, et c’est jouissif.

 

La cerise sur le gâteau, c’est que Orienteer est beau. D’accord, ce n’est pas le réalisme de Skyrim boosté d’une centaine de mods, ce n’est pas la magnificence de la génération procédurale de Minecraft, mais le décor demeure assez réaliste et assez varié pour nous donner envie de le découvrir, de l’explorer, et de finalement le connaître comme sa poche à la fin des six courses proposées.