Utopia of a Tyrant (Windows)
Ahmet Kamil Keleş

 

 

 

Le 28 Mai débute à Istanbul un sit-in pacifique pour empêcher la destruction du parc Gezi au profit d’un centre commercial.

Le 31 Mai, la police turque intervient avec violence pour faire évacuer le parc. Plus d’une centaine de personnes sont arrêtées, plus d’un millier sont blessées, et six sont tuées.

Dans les quinze jours qui suivent, la population se mobilise, dont une douzaine de développeurs turcs qui décident de relater ces événements et d’en dénoncer l’horreur par les jeux.

Utopia of a Tyrant est sans doute le plus sombre des jeux développés pour la GeziJam. Il ne se déroule pas en Turquie ,en 2013, mais en Lintonia, dix ans plus tard, et présente le quotidien d’un policier dans cet univers dystopique. Les moments de doutes rapidement balayés devant la glace, les conversations « anodines », les interrogatoires, la violence, la mort.

 

Techniquement impressionnant (réalisé sur AGS à partir de modèles 3D d’Half Life 2 et Left 4 Dead 1 et 2), Utopie of a Tyrant touche surtout par l’angle singulier qu’il adopte. En nous mettant dans la peau de l’oppresseur, le jeu explique tout autant qu’il dénonce, et la pauvreté de son interaction ne fait que rendre son propos plus poignant : dans un système dictatorial et répressif, a-t-on vraiment le choix entre bon et mauvais flic ?

 

Le disclaimer de l’auteur en début du jeu, en plus de resituer le jeu dans son contexte de création, va également dans ce sens. Il ne s’agit pas temps de pointer du doigt les individus coupable des violences commises, mais d’inspirer un dégoût pour le système tout entier, et d’encourager l’engagement politique. Et sous cet éclairage, il est difficile de contester que Utopia of a Tyrant est une réussite.